VIGNACOURT

sommaire :
– la commune :
          – son histoire
          – son nom
          – des anecdotes
          – de l’emphase rurale : le Grand Flot
          – sur la route d’accès

– la maison de famille :
          – les lieux : la maison et les possessions alentour
         – son histoire : de sa création à son abandon
         – des souvenirs

 

 

la commune :

son histoire
extrait du TU n° 25 – 2006 – Vous trouverez, sur le site internet http://vignacourt.free.fr, une monographie assez complète et fort bien renseignée sur l’histoire de cette commune, qui coiffait autrefois bien des villages alentour.

de Caroline CHAPPEY – extrait du Trait d’Union n° 3 – 1994

Une enquête sur les lieux s’imposait. Cela justifiait qu’avec Philippe Delmas, Papa n’ayant pu être de la partie (parlez-moi de l’oisiveté des retraités …) nous fassions une escapade à Vignacourt le vendredi 6 mai 1994.
J’ai eu la chance de faire le trajet en compagnie d’un oncle qui a essayé de m’apprendre le picard.

Arrivés à Vignacourt, nous nous sommes rendus à la mairie, service du cadastre. Il fallait en effet vérifier le souvenir qu’avait Oncle Philippe de l’existence d’un quartier nommé « les vignes du haut » justifiant ainsi le nom Vignacourt. L’étonnement de l’employée de la mairie était à la hauteur de notre joie en ayant trouvé confirmation.

Devant notre intérêt pour sa ville, elle nous a suggéré de nous rendre chez Pierre Thuillier (un cousin sans nul doute), agriculteur et surtout historien

Passé le premier moment d’étonnement après que Philippe Delmas se fut présenté, il nous fit rentrer dans sa cuisine. A côté du bol, une collection impressionnante de livres et de revues d’histoire.

Il a évoqué le souvenir des sœurs Lassalle, d’un médecin habitant rue de Varenne, d’Adolphe Landry et de ses filles, de César Campinchi. Son beau-frère, Monsieur Gamard, travaillait au « château » et avait demandé à César Campinchi si la seconde guerre serait évitée, ce dernier avait répondu « On fait tout pour l’éviter ».

Né en 1925, il jouait avec Claude et Philippe nous a-t-il dit, ajoutant que dès que la cloche sonnait, chacun retournait déjeuner chez soi.

Il nous a appris avoir fait des recherches généalogiques sur la famille Thuillier pour le compte d’une Madame Loverini qui l’a contacté en mars dernier afin de faire une thèse sur Adolphe Landry, au plus grand étonnement de Philippe Delmas.

C’est ainsi que nous pouvons remonter encore d’une génération dans l’arbre généalogique qui commençait par Jean-Baptiste Thuillier et Joséphine Mercier que je peux maintenant dater !

Nous avons pris congé de lui, l’assurant que Claude et Philippe passeraient le voir !!! (son adresse : 483 rue Saint Amour, Vignacourt – Tél 22 51 31 98), et sommes passés devant le château du Parc ou ce qu’il en reste, puis au cimetière où les tombes Thuillier, Théot, Binet se comptent par dizaines

Après avoir déjeuné à la Chaussée-Tirancourt, de manière décidée nous nous sommes rendus à Etouy (à quelques kms au nord-ouest de Clermont – Oise). Dans l’église de ce village se trouve en effet un monument funéraire élevé à la mémoire d’Adrien de Wignacourt et sa femme.

Pour ceux qui feraient ce périple et qui trouveraient l’église fermée, il faut se rendre à la mairie, presqu’en face, où, sur votre bonne mine, l’on vous remettra les clefs de l’église. C’est donc avec Saint-Pierre en la personne d’Oncle Philippe, que je pénétrais dans cette église.

Le monument funéraire représente Adrien de Wignacourt et sa femme, Louise de Saint-Périer, agenouillés sur des prie-Dieu.

Devant ce monument, figure une épitaphe sur laquelle est rédigée, en latin, l’apologie d’Adrien de Wignacourt et dont voici la traduction remise par Tante Lala :
« ici repose le très noble et très célèbre chevalier, sire Adrien de Wignacourt, seigneur de ce lieu, de Litz, de la Rue Saint-Pierre et de Balloy (en Champagne), chef de 100 hommes d’armes sous le commandement du très illustre prince Alexandre de Vendôme ».

Sa famille est originaire de Belgique (qui comportait alors l’Amienois) où maintenant encore la branche aînée brille d’un vif éclat. La branche cadette a dans le Beauvaisis une longue suite de personnages distingués. Celui-ci survécut à ses très illustres frères : Aloff, prince de l’île de Malte et grand-maître des chevaliers de Jérusalem,

Joachim, chevalier de l’ordre du Roi, seigneurs de Balloy pendant quelques temps.

Après de nombreux exemples de courage militaire et après une existence réputée à bon droit comme tout à fait intègre, il mourut très saintement dans la 71ème année de son âge, des suites de l’opération de la pierre.

Le premier il quitta le château de ses ancêtres que l’on voit encore (?) à la Rue Saint-Pierre. En septembre 1628, il fut enterré selon son désir dans le domaine qu’il avait acheté. Ici repose auprès de lui sa très noble et très chère épouse, Louise de Saint-Périer, ravie environ 7 mois auparavant dans sa 43ème année, après 30 ans de l’union la plus parfaite et la plus sainte et après lui avoir assuré l’avenir de sa noble maison par une nombreuse postérité. Leurs enfants pleins d’affection ont élevé ce monument à leurs excellents parents – qu’ils reposent en paix.’

son nom – par Philippe DELMAS  – extrait du Trait d’Union n° 3 – 1994

Deux sources s’affrontent :
– une source germanique : Wignacourt serait un nom d’homme;
– une source latine : « vina curtis » = le jardin de la vigne.

En faveur de la première : une certaine tradition … appuyée par l’existence, au musée du Louvre d’un tableau du Caravage (Michelangelo MERISI, detto Il Caravaggio 1571-1610); le tableau daté de 1608 environ, représente Alof de Wignacourt 1547-1622, Grand-Maître de l’Ordre de Malte de 1601 à 1622. Vêtu d’une armure, il ne porte ni blason ni armoiries; son « page » porte simplement sur la poitrine, la croix de Malte.
note : la paternité du tableau du Caravage est un peu contestée par les spécialistes du musée du Louvre … Sans doute, le personnage principal ne témoigne pas d’une sensualité débridée telle que celle d’une Sainte Famille dont la Fabrique qui l’avait commandée a refusé de prendre livraison.

Mais il faut reconnaître que la tronche de notre cher peut-être ancêtre (reproduite dans le Petit Larousse Illustré) ne s’y prête guère. Par contre, l’artiste a cru devoir ajouter, à côté d’Alof, son page préféré, dont la gueule d’ange n’est pas nécessairement masculine (et même si cela était .. : Alof avait-il vraiment besoin de se faire représenter avec « son » page ?), et dont les beaux cheveux blonds, coiffés à la garçonne, peuvent inciter au rêve. Mais ceci n’a rien à voir avec notre sujet.

→ qui veut se charger d’aller fouiller dans les archives de l’Ordre de Malte ?

D’aucuns seraient enclins à penser que cette noble paternité serait une invention de certains vignacourtiens heureux de se donner à bon compte des armoiries !

En faveur de la seconde :
– l’évidence (… mais il parait qu’il faut s’en méfier !). Et l’existence sur le cadastre de la commune de deux quartiers : « aux vignes » et « sous les vignes ». Il convient de rappeler que, au moyen-âge, la vigne se cultivait très haut dans notre pays; sans doute, le vin devait être un peu âpre et âcre, mais on consommait pas mal de vin de messe : la période était bougrement plus religieuse que l’actuelle;
– un article de René Gamard : la famille du seigneur de Wignacourt tirait son origine du petit village du même nom (aujourd’hui canton de Picquigny, arrondissement d’Amiens), dont les paysans, pour le dire en passant, semblent n’avoir pas eu très bonne réputation si l’on en croit ces dictons rapportés par un auteur picard : « Chés coterbaindiers de Wignacourt o n’o qu’à aller à Wignacourt pour treuver feux témoin ».

Cette famille s’établit ensuite dans le Beauvaisis et Adrien de Wignacourt, en octobre 1609, devient acquéreur d’Etouy, (près Clermont, de l’Oise). Dans l’église, se trouvent des statues d’Adrien de Wignacourt et de sa femme Louise de Saint-Périer.

Note : pour les connaisseurs, les armoiries de la famille « de Wignacourt » sont : « d’argent à trois fleurs de lys au pied coupé de gueules surmontées d’un Iambel de même »

 

encore son nom – de philippe DELMAS – extrait du Trait d’Union n° 8 – 1995
« Les plus grandes civilisations sont nées dans les pays où poussaient la vigne », affirme un botaniste philosophe.

Nos lecteurs férus d’histoire des civilisations (je ne connais pas le terme savant qui conviendrait) pourraient-ils indiquer à la rédaction du T.U. si cette affirmation est bien vraie.

Et si, accessoirement, elle peut s’appliquer à Vignacourt, pays de la vigne qui, à défaut d’avoir vu naître une civilisation, a conçu notre très brillant aïeul Alfred.


réponse de Jean-Pierre LASSALLE – extrait du Trait d’Union n° 9 – 1995

Je pense que l’affirmation (rapportée dans T U n° 8 et qui n’engage que son auteur) de ce botaniste-philosophe ne peut s’appliquer à Vignacourt.

En effet, mon père Jean Lassalle, dont je n’ai jamais songé à mettre en doute ni la grande érudition, ni l’imagination fertile, avait sa propre explication sur l’origine du nom du berceau de nos ancêtres : l’absence de tout vignoble local faisait de cet illustre village un pays « à court de vignes » … d’où son nom.

Mais je pense malgré tout que la branche Alfred Thuillier, avec son apport ultérieur de sang corse et basco-béarnais, est une véritable civilisation qui aura marqué les 19è et 20è siècles, et sans aucun doute, marquera aussi le 21è.

 

des anecdotes

Parmi les curés de l’église, figurent Jean Thuillier, chanoine-curé en 1746, et Louis Thuillier. chanoine-curé en 1771 : faisaient-ils partie de la famille de nos ancêtres ?
Et, parmi les maires, on trouve Antoine Thuillier, en fonctions de 1803 à 1811 : était-il notre ancêtre ?

 

 sur une réputation …

Dans son numéro 8, le Trait d’Union évoquait la réputation de contrebandiers attachée à certains habitants de Vignacourt. la Rédaction vient d’en recevoir une confirmation explicative par l’extrait, ci-après, de la revue picarde « Ch’lanchron » ( = la fleur de pissenlit, comme celle du LAROUSSE), numéro 64 :

Faut savoèr eq des deux cotés de no rivière l’Ussy, chès impôts i n’étoient point pareils. In Picardie, i falloait poayer l’gabelle : ch’sé i coutouait au moins chinq foés pu tchèr qu’in Artoés. Ch’toubac aussi l’étouait gramint pu tchèr. J’ai point bsoin d’vous dire qu’i y avouait un sacré trafic dsu l’rivière !

Chés contrebandiers iz avoait’t tous chès ruses pourén point s’foaire avoér par chés gabelous.

Mais ch’pu bieu trafic, ch’étoait s’jour d’él procéssion d’éch Saint-Sacrémint. Aveuc él croè, monsieu l’tchuré i passoait ch’pont. Darrière li, y avoait des masses éd gins : fallait zzés vir s’dondiner conme des lourdauds. Chés gabelous, i n’osait’t mie rien dire ni rien foaire, pour én point foaire offinse à ch’Bon Diu..

Mais quand él procession al rapassoait, tous chès gins lo iz avoait’t pérdu l’mitan d’Ieu panche. Iz étoait’t ardevnus comme des saurets. Agvinez pourquoi !

la Rédaction pense qu’il est inutile de donner une transcription en patois français : nos honorables Lecteurs, bien informés désormais, auront à coeur de lire tout haut. La Rédaction n’en reste pas moins à leur disposition pour toute confirmation utile. Elle signale néanmoins, dès maintenant, que le mot « sauret » figure dans le Petit Larousse Illustré – et que le mot « mitan » figure dans ie Larousse « Lexis » (et, sans doute, dans des dictionnaires similaires).

Ch’lanchron ajoute : « La réputation était valable aussi pour Flesselles, la ligne de chemin de fer y aidant beaucoup. Des réputations étaient attribuées à de nombreux villages : chés mulets de St Vast – Ailly ché un poéy ed’bandits – à St Sauveur, village d’usines, y o pus ed’putains qu’ed voleux.

 

encore la réputation ! – de Pierre THUILLIER – extrait du Trait d’Union n° 8 – 1995 – source : Journal d’Amiens » du 15/16 mai 1890

Dimanche de grand matin, des gendarmes de la brigade d’Airaines s’étaient embusqués dans le bois de Saint-Léonard, attendant des contrebandiers dont on leur avait annoncé le passage.

Après quelques minutes d’attente, ils aperçurent une voiture bâchée et attelée d’un cheval qu’un individu conduisait par la bride. Dès que celui-ci aperçut les agents de l’autorité, il prit la fuite à travers bois. On n’a pu le rattraper.

Les militaires se disposaient à visiter la voiture quand ils furent fort surpris d’y trouver un autre individu blotti dans un coin. L’homme sortit de sa poche de pantalon un paquet de tabac de 100 g, il le cassa en deux et en mangea la moitié. Les gendarmes tendaient le bras pour prendre l’autre partie, que celle-ci était déjà avalée ainsi que l’enveloppe du paquet ; ils ne purent que s’emparer de la bande. Comme on lui demandait le motif de ce repas végétal, le contrebandier répondit : « que c’était pour faire passer son mal de dents ». Il fut néanmoins arrêté. C’est un marchand de veaux de Vignacourt, nommé Anézime Théot.

 

les surnoms – de Philippe Delmas  → extrait du Trait d’Union n° 18 – 1999

Je lis dans une revue picarde quelques réputations du temps passé ; « ches beudets d’Fléchelle » – « chés mulets de St Vast » – « Ailly, ché un poéy ed’bandits » – à St Sauveur, village d’usines «y o pu ed’putains qu’ed voleux » – « chés conterbaindiers de Wignacourt … o n’o qu’à n’alla à Vignacourt  pour treuver feux témoin » – « chés tchots allapins blancs éd Vignacourt ».

Je connaissais le surnom des habitants de Flesselles (village situé à 5 km de Vignacourt) : ces gens-là sont tous des ânes, des baudets – ceux-ci ricanent, ce sont des ricaneux, ou, en abrégé, des caneux : ce dernier terme était le surnom du tenancier du Café du Parc à Vignacourt, car ce tenancier était originaire de Flesselles.

Par contre, je n’avais jamais entendu parler des petits lapins blancs de Vignacourt : quelles délicates allégations cette définition pouvait-elle masquer ? Pour en savoir plus, j’ai écrit à la revue : voici la réponse : « Après la guerre de 14-18 et ses horreurs (voir le cimetière de Vignacourt), les habitants se sont lancés dans les plaisirs de la paix revenue : fêtes des écoles, fête locale – un jour une association a fait du théâtre : on a fait danser les petits enfants déguisés en lapins blancs – à l’époque les marchands de toute sorte entre autres les « coconiers » (ou « coquetiers »: collecteurs d’œufs, poules, lapins) passaient régulièrement, et, en picard, faisaient l’éloge de leurs fêtes – quand un coconier pouvait avoir des lapins blancs, nous avions droit à « si oz’avouêt vu chés tchos allapins blancs éd Vignacourt », et c’était reparti.

 

de l’emphase rurale : le Grand Flot

Lors de leur visite à Vignacourt, le 6 mai 1994 (voir le Trait d’Union n° 3, reproduit dans l’article sur Vignacourt), Caroline et son oncle Philippe sont passés devant cette mare, appelée « le Grand Flot ».

Encore au début du siècle dernier, et tant que l’alimentation en eau par réseau public n’était pas assurée, la plupart des communes disposaient de mares, notamment pour l’abreuvement du bétail.

Ces mares n’étaient pas polluées par les résidus des voitures, qui n’existaient pas.

Elles ont été petit à petit comblées – sauf quelques-unes, pour la décoration et le tourisme.

 

sur la route d’accès

 

la maison de famille :

 les lieux : la maison et les possessions alentour

1 – L’emplacement du bâtiment principal, « l’catieu » pour les voisins, « le château » pour les non-picardophones, a été constitué sur un rassemblement de parcelles existantes, rassemblement débuté par André THUILLIER, grand père d’Alfred,
remarque : il n’y a pas que dans le bordelais qu’on sait être emphatique !


Voici l’état du cadastre au temps d’Alfred (la partie semée en rose est la partie principale – la partie semée en bleu est la maison bleue et son terrain : voir plus loin – la partie semée en vert est la potager – la partie semée en marron est le garage).

2 – Voici l’état de la maison principale : au temps d’Alfred – puis 
puis alors qu’on construisait, à droite, l’aile dite « Lassallle », enfin avec cette aile.

 

 

Il existait 35 chambres : chaque membre de la famille, chaque couple, chaque petit-enfant (ou paire) disposait de sa chambre.
L’équipement sanitaire était somptueux – en fait, il s’agissait d’éléments comportant un défaut d’aspect (une « piqure ») que la Maison THUILLIER ne pouvait installer en clientèle.

voir plus loin l’histoire de cette maison après 1939.

2 – Le potager (la partie verte du cadastre) comportait un emplacement réservé aux enfants, où ils pouvaient faire pousser des radis (hâtifs, ronds roses à bout blanc), des laitues, des fleurs.

3 – Devant le bâtiment principal, de l’autre côté de la route d’accès, il existait un garage (la partie marron du cadastre) pour plusieurs voitures, avec des chambres au premier étage.
C’était (quand il accompagnait la famille) le domaine de Charles, le très fidèle chauffeur (qui tenait à marier tous les membres de la famille, à sa façon, en voiturant les jeunes mariés là où il le fallait).

4 – A 800 mètres, il existait un moulin d’un assez ancien type : les ailes étaient occultées ou découvertes (en fonction du vent) par des toiles qu’on dépliait ou rabattait.

 
Au fil du temps, il avait perdu ses ailes, et l’habillage commençait à se déliter.
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Notre aïeul Alfred l’avait alors aménagé en pièce à vivre, avec chauffage (voyez la cheminée en haut à droite).
Ce moulin servait de lieu de pique-nique.
 

5 – A quelques kilomètres, il existait  un bois « de la Chaussée » avec, comme « pavillon de chasse » un bâtiment relativement important si l’on en juge d’après la hauteur de la cheminée restée debout après un incendie.

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Le bâtiment a été reconstruit.
Le bois servait de pique-nique.

son abandon

Pendant la guerre de 1939-1945, la maison a été réquisitionnée par l’armée allemande … qui n’a pas pris le soin de l’entretenir.
Après la guerre, la famille a décidé de ne pas la réhabiliter, du double fait du coût certainement élevé (la couverture, à tire d’exemple, était un chef d’œuvre de professionnel : pas de terrasse, des clochetons !), et que chaque branche de la famille avait pris ses habitudes par ailleurs.
La famille a eu un grand mal à faire accepter à la commune que nous lui offrions le bâtiment et son terrain (en échange de bons de construction sur Amiens), espérant qu’elle engagerait les frais utiles – l’espoir a été déçu : quelques années plus tard, la partie principale du bâtiment a été démolie.
Toutefois, le lot supportant la « maison bleue » (voir plus haut), du nom de ses volets, donnant en fait sur la rue principale, la rue d’Amiens, a été détaché pour être acquis par Létizia LANDRY (Lala) selon acte reçu par Me Neviaski, notaire à Amiens, le 24 octobre 1960.


souvenirs de Lala : Les années passèrent : guerre, résistance et enfin l’armistice que j’ai appris étant dans un petit village au dessus du lac de Constance (je m’étais engagée comme « chauffeur poids-lourds » et conduisait un 3,5 tonnes  à la 1ère Armée- mais ceci est une autre histoire !)

Alors je me suis « démobilisée », toute seule, estimant qu’à présent mon rôle était de m’occuper de la reconstruction : c’était une grande tâche à accomplir pour tous. Dans notre chère Picardie, que de ruines !
Je me souviens, le cœur serré, de ce petit village dont pas une maison n’était restée debout ; au milieu des pierres, restes de l’école, j’avais trouvé les feuillets d’un cahier d’enfant, à moitié déchirés, qui avait recopié son modèle : « aimons-nous les uns les autres » ; et de tous ces immenses cimetières.

Aucun d’entre nous dans la famille n’avait la fortune ni l’ambition de garder le « château du Parc » complètement pillé par les Allemands (et les gens du village …). Mais pour construire son jardin, grand-père avait acheté au fur et à mesure plusieurs « bicoques » en torchis qu’on avait démolies. On avait laissé debout des vieilles granges et au-delà, une cour et enfin une grande maison qui donnait sur la rue d’Amiens. C’était une grande maison, surélevée de 2 marches sur le trottoir avec de belles pièces de 3m20 de hauteur sous plafond, 1 étage avec plusieurs chambres et un grenier avec une belle charpente. On avait malheureusement recouvert toute la charpente extérieure de plâtre ou torchis mais peins les volets en bleu, c’est pourquoi on l’appelait « la maison bleue ». Quand j’étais enfant, grand-père la louait à un gentil ménage d’instituteurs, Monsieur et Madame Loriot chez lesquels on m’envoyait prendre des leçons : hélas, malgré leurs efforts, je n’ai rien compris à la grammaire et continue à faire des fautes d’orthographe.

Bref la famille a été d’accord et on m’a permis de reprendre la Maison Bleue. J’avais trouvé son « acte de naissance » en recherchant dans les « impôts sur les portes et fenêtres » car c’était presque la seule du village à avoir cette importance. Aujourd’hui elle doit avoir 200 ans.

Et m’étant installée là-bas pour les longues périodes d’été, j’y gardais mes petits-enfants Marie-Claude et Olivier pendant leurs vacances scolaires, leurs parents travaillant à Paris. J’avais une auto (j’ai conduit jusqu’à 83 ans) ce qui rendait la vie plus facile et agréable.

 

Nous avons retrouvé deux documents qui évoquent la triste fin de notre château familial :
     – le discours prononcé en 1958 par Maurice LAMY à l’occasion de la remise du château à la Municipalité de Vignacourt;
     – la lettre du Préfet de la Somme, datée de 1971, expliquant l’impossibilité de conserver cette propriété.

Discours du Professeur Maurice Lamy, le 8 juillet 1958, date de la remise du château à la municipalité.

Monsieur le Maire,

Messieurs les Conseillers Municipaux,

Mesdames, Messieurs,

C’est sans nul doute ma qualité de picard qui me vaut cette délégation, le privilège de vous remettre officiellement cette maison et l’honneur d’évoquer la présence de quelques-uns des hommes qui y ont vécu.

Alfred Thuillier fut à la fois le bâtisseur de ces murs et le fondateur de notre grande famille. Né à Vignacourt il y a 120 ans, sa puissance de travail, la vigueur de sa volonté, la qualité de son intelligence, firent de lui le chef d’une maison parisienne florissante à la prospérité de laquelle – préoccupé de philanthropie – il tint à associer ses collaborateurs, employés et ouvriers. Républicain résolu, démocrate sincère mais sans sectarisme ni virulence, patriote intransigeant aussi, il appartenait à la famille spirituelle des Gambetta et des Jules Ferry. Comme eux, il pensait qu’une philosophie politique devait être faite, avant tout, d’action. Président du Conseil Général et Sénateur de la Seine, il combattit pour que fut donnée aux vieillards l’assistance et aux jeunes, l’instruction.

La fille aînée d’Alfred Thuillier avait épousé Lucien Lassalle dont la mort vient de plonger dans le deuil non seulement ses enfants mais aussi les amis innombrables qu’au cours d’une longue existence il avait rassemblés autour de lui. Vous savez les charges qui furent les siennes, les honneurs qu’il rendit, tout au long d’une carrière exceptionnellement active, tant à la présidence de la Fédération Nationale du Bâtiment qu’à la Chambre de Commerce et d’industrie de Paris. Mais ces tâches administratives, si lourdes qu’elles aient été, ne l’ont pas écarté des préoccupations sociales. Nous n’oublions pas la part qu’il a prise à la mise en place des allocations familiales, comme au développement des écoles d’apprentissage et des centres d’enseignement.

Que vous dirai-je, Messieurs, d’Adolphe Landry que vous ne connaissiez déjà ? Normalien à 19 ans, philosophe, économiste, professeur, Adolphe Landry pensa comme son beau-père, Alfred Thuillier, qu’il ne pourrait mieux servir son pays que dans l’action politique. Nous savons tous quel grand parlementaire il a été, avec quelle rigueur, quel sens élevé du devoir, il a dirigé plusieurs départements ministériels, et nous nous rappelons avec fierté qu’aux jours sombres, il a refusé son vote à un gouvernement d’abandon. Mais c’est son œuvre de démographe qui perpétue le nom d’Adolphe Landry.

Si la natalité française, naguère déclinante, s’est relevée d’une aussi merveilleuse façon, c’est à coup sûr à l’élaboration et à l’utilisation du code de la famille que nous le devons. Ici, à côté des noms d’Edouard Daladier et de Paul Reynaud, celui d’Adolphe Landry doit être cité au premier rang.

César Campinchi a animé la place où nous sommes de sa parole éblouissante. Avocat prestigieux parvenu au faîte de la plus belle carrière, il estima lui aussi qu’il servirait mieux encore son pays dans les Assemblées et les Conseils du Gouvernement. Ministre de la Marine en 1940, il fut de ceux qui ne désespérèrent jamais du Salut de la Patrie. Pourquoi une mort stupide nous a ravi cet homme exceptionnel avant la victoire dont jamais il n’avait douté ?

Mesdames et Messieurs, cette maison pour nous est toute sonore de souvenirs, souvenirs heureux, souvenirs mélancoliques aussi. Ce que nous aimions à évoquer surtout, c’est la présence de nos enfants, groupés dans une famille unie autour de Madame Alfred Thuillier, de Madame Lassalle et de Madame Landry, ces femmes de cœur ont laissé soixante-quinze descendants et c’est en leur nom que je parle aujourd’hui. Ces enfants appartenant à quatre générations, ont joué sur ces pelouses et nous serons heureux de voir les vôtres, chers compatriotes, éclairer ces murs et ces jardins de leur jeune gaîté. Vous vous rappellerez les vers que, dans « L’Art d’être Grand-Père », le poète leur a consacrés :
« Les bouches des petits sont de murmures pleines »
« Ils sont de vermeils, ils ont de plus riches haleines »
« que n’en ont les roses de mai dans leurs ravins »
« Et l’aurore frissonne en leurs cheveux divins ».

Ces enfants, c’est notre avenir, l’avenir de notre pays. Que pouvons-nous faire de mieux que de vous aider à les soigner, à les instruire et à les préparer à la vie.

C’est dans cet esprit que nous vous remettons cette maison, Monsieur le Maire.

 

LE PRÉFET DE LA RÉGION DE PICARDIE – PRÉFET DE LA SOMME

Amiens, le 20 Novembre 1971

        à Monsieur le Professeur Maurice LAMY – Membre de l’Académie de Médecine
                                             94, Rue de Varenne   –   PARIS (VII °)

Monsieur le Professeur,

Vous avez bien voulu appeler mon attention sur votre regret de constater l’état d’abandon dans lequel se trouve la propriété dite « Château du Parc » à Vignacourt qui a fait l’objet d’une donation à la commune par acte du 8 Juillet 1958 de la part des descendants du Sénateur Alfred THUILLIER. Ainsi que je vous l’indiquais dans ma lettre du 25 octobre dernier, j’ai     porté à cette affaire une attention personnelle. C’est ainsi que je me suis rendu sur place et que j’ai pu constater moi-même la réalité telle que vous me l’aviez dépeinte.

Comme vous-même, je suis bien entendu tout à fait désolé de voir qu’une telle propriété soit à l’heure actuelle complètement délabrée ce qui rend aléatoire toute possibilité de récupération des bâtiments existants. D’après ce que j’ai vu, il faut convenir qu’à moins de découvrir un mécène, la demeure est malheureusement perdue.

Reste le terrain et il y a là des éléments d’un assez joli parc planté, naturellement à l’abandon, mais qui peut permettre une utilisation conforme au vœu que vous m’exprimiez.

J’aurais souhaité rencontrer, à l’occasion de ma visite, le Maire actuel de Vignacourt ainsi que son prédéces­seur mais cela n’a pas été possible. Les vérifications opérées, tant en ce qui concerne l’acte de donation que la délibération du Conseil Municipal l’acceptant, m’avaient en effet confirmé qu’aucune charge n’avait été précisée ; mais je souhaitais vérifier dans quel esprit l’ancienne municipalité avait reçu cette donation et si une sorte de charge morale pesait sur son utilisation.

Au demeurant, il semble bien que la municipalité de l’époque ait entrepris des démarches en 1959 à l’effet de rechercher une collectivité qui aurait pu être intéressée par l’utilisation du Château du Parc comme maison de repos. Ces démarches, à la vérité difficiles, n’ayant pas abouti, le Conseil Municipal avait ensuite profité du projet d’installation d’une usine de confection pour envisager de lui céder la propriété en vue d’assurer le logement de ses cadres, sous réserve de remise en état de l’immeuble et d’une inter­diction de revente avant 10 ans sans que priorité soit proposée alors à la commune elle-même. Malheureusement les pourpar­lers engagés en ce sens n’ont pu aboutir davantage.

Je viens donc de saisir officiellement du problème la nouvelle municipalité de Vignacourt afin de faire le point des projets antérieurs et de connaître ses intentions futures. J’en­visage d’ailleurs de demander à mes services départementaux d’aider la commune à trouver la meilleure utilisation de cette propriété. Je pense notamment à la Direction Départementale de l’Action Sanitaire et Sociale ainsi qu’à la Direction Départe­mentale de la Jeunesse, des Sports et des Loisirs.

Dans l’immédiat, j’ai tenu à vous donner mon sen­timent et à vous informer de l’action que je compte mener, soucieux de faire en sorte qu’en l’absence de charge écrite, soit tout au moins respecté autant que possible l’esprit qui a pu présider à la donation de ce bien, désormais intégré au patrimoine communal et dont il importe de faire cesser la dé­gradation.

J’aurai soin de vous tenir au courant du résultat de mes démarches.

Quant au bois de la Chaussée : les Allemands, à la fin de la dernière guerre, y avaient installé une rampe de lancement de missiles V 1 – la Résistance en avait alerté les Alliés, qui sont venus bombarder, mais se sont trompés de bois, au détriment d’un bois « d’Amour » assez proche (ce joli nom était sans doute dû au fait que les amoureux s’y donnaient rendez-vous).
A la Libération, la rampe est tombée intacte aux mains des Alliés, qui, par précaution, l’ont rendu inopérant en en faisant sauter la rampe principale – c’est dommage pour la famille, qui aurait pu clore et organiser des visites payantes …

des souvenirs

de Colette LAMY – extrait du Trait d’Union n° 1 – 1993

De ma jeunesse, (je suis née en 1906), c’est certainement de Vignacourt que je garde les plus vifs souvenirs.

Quelle en est l’explication alors que j’ai vécu rue La Fayette et boulevard Flandrin plus de neuf mois par an avec mes parents et mes quatre frères et sœurs où l’ambiance était fort gaie ?

Mais parlons de Vignacourt, ce sympathique petit village de la Somme puisque Vignacourt il y a.

Notre grand-père Alfred Thuillier, dont la vie particulièrement intéressante et mouvementée mériterait une étude particulière, aimait beaucoup ce petit coin picard où il avait passé toute son enfance. De vouloir quand on est adulte, et qu’on a fait un très grand pas dans le domaine social, s’installer au lieu de sa naissance me parait assez troublant. J’avais 6 ans quand il est décédé (1912), je ne lui en ai donc jamais parlé mais il s’agit là d’un souhait qui mérite intérêt.

A Vignacourt, nous étions constamment avec nos grands-parents. Avec Granny, c’est ainsi que nous avons tous nommé notre grand-mère, plus qu’avec grand-père, certes, mais combien il aimait circuler dans son jardin avec Ulysse, le jardinier ou Léonide, entouré de ses petits-enfants très attentifs à ses propos : « Coupez ceci, élaguez cela » etc..

Puis après 1912 et le départ de mon grand-père, la même vie continuait avec seule Granny pour commander. Aucun de ses enfants ni petits-enfants n’a jamais vraiment pris sa place quand il s’est agi de la direction du jardin et du potager qui était au fond du parc.

Papa – Lucien Lassalle – aimait les travaux – c’était son métier – il a beaucoup travaillé et transformé l’intérieur de la maison mais il n’en franchissait pas le perron pour descendre au jardin si ce n’était pour y faire installer une table de bridge et quatre chaises !

Oui, je pense que c’était l’atmosphère familiale créée par Grany qui m’a fait aimer Vignacourt.

Toujours avec elle, nous étions réunis dans le jardin où elle m’apprenait à lire, avec beaucoup de courage car je n’étais pas douée. Je me souviens de la syllabe « oi » : je criais un bruyant « canard » représenté sous les deux lettres. Et tout était un peu comme cela, mais elle ne perdait jamais patience. Elle nous a appris à coudre, à repriser, à tricoter et à crocheter car c’était là son occupation préférée.

Quand nous avons été plus grands, nous avons commencé à lire sous sa direction. Elle adorait Galsworthy. Elle dormait très mal, mais quand elle se réveillait à 4 heures du matin, elle ne prenait pas comme moi un cachet de Rohypnol, mais se plongeait dans la saga des « Forsythe » de Galsworthy et nous en parlait.

Quand nous n’étions pas avec Grany, nous allions nous promener à bicyclette – Madeleine et moi, accompagnées d’Amy (même génération), faisions de grandes randonnées et aimions beaucoup ces longues courses en pleine campagne.

On y jouait au tennis, on y jouait du piano, on lisait l’Illustration dont la collection était presque complète, et puis on était en vacances. Et cela dura toujours puisque nous avons fréquenté Vignacourt jusqu’en 1939. J’avais 36 ans, ce ne sont plus des souvenirs d’enfance.

 

de Lala (Létizia LANDRY) – extrait du Trait d’Union n° 2 – 1994

Plus qu’une autre j’ai des souvenirs de Vignacourt où mes grands-parents m’emmenaient souvent, je revois Grany (toujours en noir) avec son petit tablier de satin dans la poche duquel il y avait son sécateur et un petit canif avec lequel elle épluchait et partageait un fruit mur entre nous. Et grand-père Alfred se promenant dans le jardin en croquant des petits oignons crus. J’avais 12 ans quand il est mort et pendant des années, chaque fois que je découvrais un nid d’oiseau, je me disais instantanément « je vais le dire à grand-père » !.

Le jardin avait été admirablement dessiné et planté sur les conseils des architectes-paysagistes du jardin du Luxembourg (Grand Père était sénateur à un moment de sa vie) et je me souviens avec attendrissement d’une petite tonnelle recouverte de grandes feuilles d’aristoloche…

 

de Jean-Pierre LASSALLE –  extrait du Trait d’Union n° 2 – 1994

Faisant appel à mes souvenirs d’enfance, je vous raconterai que j’ai passé toutes mes grandes vacances successives, dont je garde un souvenir inoubliable, à Hardelot et à Vignacourt, avec votre père et Claude.

Nous formions la bande des « grands », opposés aux « petits » : Marc, Bernard, Catherine (Lamy-Spalter) seule fille, la pauvre, et Didier. Les Weulersse n’existaient pas encore. De temps en temps se joignait à nous Dominique (Delmas-Lantz), petite fille de Lucie (Thuillier-Landry) et qui nous a hélas quittés. Mais c’était une « grande », qui nous intimidait un peu et ne s’intéressait guère qu’à Claude… à qui sa situation d’ainé conférait d’autres privilèges! Les « adultes » lui avaient confié la clef de la cave, et c’est lui qui approvisionnait leur table en vins.., et je dois le lui reconnaître, parfois nous aussi, certains soirs venus.., mais pas assez souvent au goût de votre père ni au mien, car votre oncle avait desprincipes. Quant à nous deux, notre mission de confiance consistait d’aller à bicyclette porter les lettres à la poste (et Dieu sait qu’on écrivait souvent à cette époque), distante de plusieurs kilomètres par un mauvais raccourci où nous nous prenions pour les Duclos-Lassalle (non, pas de la famille…) ou les Bernard Hinault de maintenant.

 

de nos archives – extrait du Trait d’Union n° 8 – quelques pièces de théatre

de philippe Delmas : je me souviens avoir été impressionné en apprenant que l’eau approvisionnant le château provenait d’un puits de 90 m de profondeur ! – et j’ai été amusé d’entendre l’anecdote de l’ouvrier qu’on descendait au treuil, sur une sellette, pour détecter une fuite, et qui s’est mis à hurler à mi-parcours : il existait bien une belle fuite sur le tuyau de remontée, qui l’avait aspergé !

le cabinet de toilette d’Alfred

Au premier étage de la maison familiale (l’catieu pour les aborigènes), Alfred avait installé un cabinet de toilette, accessible depuis sa chambre, de dimensions approximatives 4m x 4m, avec une belle vue sur le jardin.

La pièce comportait, au début, une table avec un broc et une cuvette : la pièce était à l’extrème opposé de l’arrivée d’eau dans le bâtiment – il n’y avait pas de distribution publique (chacun avait sa citerne – et le puits, privatif, allait jusqu’à 90 m de profondeur – par la suite, on a installé un grand lavabo avec eau froide et eau chaude.
Il y avait des armoires et des étagères – et c’est tout !

Le sol était recouvert d’une plaque de tole qui occupait toute la surface, avec des pentes vers une bouche d’évacuation, et des bords relevés sur 10 cm.

On pouvait ainsi, après s’être savonné, se rincer avec une éponge ou un gant en s’aspergeant généreusement.

il s’agissait d’un système précurseur de la douche. Il existait bien à l’époque, et depuis l’antiquité, des baignoires (disponibles, notamment, dans les entreprises de plomberie …) – mais l’eau chaude, là bas, coutait cher à amener en quantité.

Nous avons cru utile de rappeler ce fait, pour témoiger de l’inventivité de notre aïeul, et pour les cas, encore aujourd’hui, où l’on disposerait seulement d’un lavabo dans un placard (avec moquette !), ou d’une simple cuvette avec un broc – en simplifiant l’évacuation : après des ablutions (volontairement modestes), on vide le réceptacle dans le lavabo ou dans un seau.
rappel : la toilette d’un malade se fait avec une cuvette d’eau  (ou plus souvent deux : une pour savonner, une pour rincer) et une éponge.

On peut, sur internet, trouver des entreprises qui feront à façon le réceptacle que vous désirez.

Accessible depuis la même chambre, il existait un WC avec une lunette en bois d’acajou verni.

sources : souvenirs des deux Philippe, Chappey et Delmas.

 

note : le château disposait de son propre papier à lettres

 

→ anonyme – à propos du bois de la Chaussée : le sol était tapissé de fraises des bois absolument délicieuses.

 

→ des deux Philippe, Chappey et Delmas – encore à propos du bois de la Chaussée

– avec nos cousins Chappey et Lassalle, nous avions trouvé intelligent d’acheter des pétards, et, pour être tranquilles, de les mettre en œuvre au bois de la Chaussée.
L’été était sec, et les arbustes ont pris feu !
Heureusement, ils étaient bas, et, en tapant ardemment avec des branchages, nous avons pu éteindre.
Nous n’étions pas trop fiers – je me demande aujourd’hui si nous avons informé nos chers parents – je ne le pense pas, car je n’ai pas souvenir d’une raclée (verbale, bien sur) – encore que les rédacteurs de cet entrefilet n’étaient pas les aînés ! on a le sens de la hiérarchie à certains moments.

→ d’Olivier LANTZ, extrait des actualités 2019, où il parle de sa Grand-Mère Lala, qu’il appelait GrandLala, ou plus simplement GLL.

 la « maison bleue » dans la grand-rue de Vignacourt, ancienne dépendance du château, que Grand Lala (GLL) avait gardée après avoir quitté le château des Thuillier.

maison bleue car les volets étaient peints en bleu.

le trajet en Dauphine, la terreur de ma sœur Marie-Claude (Miclo entre nous) quand nous approchions des immenses poteaux électriques – géants extraterrestres – qui nous poursuivaient tout au long de la plaine.

la cave ou GLL rangeait les victuailles – il n’y avait pas de réfrigérateur – et le cidre qui se vidait d’un tiers quand on faisait « péter » le bouchon, et qui aurait pu servir de déboucheur d’évier.

le grenier où étaient rangées les pommes sur des clayettes, pommes qu’il fallait surveiller comme le lait sur le feu.

la salle de jeu dans laquelle fut installée une douche – auparavant nous nous lavions devant l’évier de la cuisine.

les chambres à l’étage – dont celle de GLL que je partageais les premières années dans un petit lit surplombé d’un photo de l’ange Gabriel.

la grande chambre traversière des enfants au-dessus du salon.

la double chambre qu’occupait les parents quand ils nous rejoignaient le week-end.

les WC accolés à la maison auxquels on accédait par l’extérieur les premières années avant qu’ils soient ouverts sur la salle de jeu et améliorés avec accès au tout à l’égout.

GLL repeignant les volets sur l’échelle.

la petite cabane sous l’immense peuplier où nous jouions à la guerre.

le puits dont il ne fallait pas s’approcher !

le potager qui occupait tout le fond du jardin avec au début un groseillier à maquereaux qui faisait mon délice, des radis noirs (très forts) et des haricots à rame que j’arrachais comme des mauvaises herbes avec une grande candeur au grand désespoir de GLL.

les soupes de carottes que je donnais à Miclo et celles de poireaux qu’elle me donnait à son tour.

le lait que nous allions chercher à la ferme chez les Theot – lait non pasteurisé que GLL faisait bouillir et qu’il fallait faire couler à travers la passoire car je ne supportais pas la peau.

la surveillance des vaches avec Bernard, le fils des Theot et l’expérience (douloureuse) de la haie électrique.

l’amour immodéré que me vouait Miclo, qui éteignait la lumière de l’escalier quand je montais me coucher et émettait des OuhOuh effrayants – et qui un jour m’a donné un coup de pelle (en fer) sur le front dont je porte encore la trace.

les journées chez les Picard (maire du village) dans leur « campagne » dans les étangs en bord de Somme avec au programme baignade dans les étangs vaseux à fond noir (beurk) et pêche au brochet.

l’utilisation de la bassine en zinc comme micro-piscine avec l’eau chauffée par le soleil.

les ballades en vélo (avec chute dans les orties)

les soirées chez Madame Trifard (veuve du médecin) pour regarder la piste aux étoiles présentée par Roger Lanzac

les visites à Amiens avec sa cathédrale et la tour Perret.

les après-midi à la piscine d’Amiens.

la visite de l’élevage industriel de poules installé par le charbonnier du village, Monsieur Rouvillain, de l’autre côté de la rue face à la maison bleue, avec sa chaine d’abattage très impressionnante pour un enfant de mon âge.