le franc douze siècles de monnaies en France
de Caroline : extrait du Trait d’Union n° 22
Nous rappellerons l’histoire du franc appelé à disparaître. Je me souviens à ce propos de Mamine (Germaine Chappey – Lassalle) qui, longtemps après l’introduction des nouveaux francs, comptait encore, pour les sommes importantes, en anciens francs. Les montants que j’entendais me paraissaient faramineux.
Créé après la désastreuse expérience des assignats, le francs aura servi de monnaie pendant deux siècles. Voici l’occasion de se pencher sur sa tumultueuse histoire.
les origines :
En 1356, à la bataille de Poitiers, le roi de France Jean le Bon est fait prisonnier par les anglo-saxons. Son fils, le futur Charles V doit payer une énorme rançon : 13 tonnes et demi d’or. Payée en 1360, elle permet la libération du roi qui rentre à Paris et pour fêter la nouvelle, on émet une pièce d’or : le franc car le roi est libre ou franc et qui vaut 1 livre, l’unité de compte monétaire depuis Charlemagne valant 20 sols ou sous qui valent chacun 12 deniers. Cette monnaie de prestige sera frappée pendant 25 ans.p
Au 15eme siècle, Charles VII en frappera une nouvelle série et au 16eme siècle, Henri III créera un franc d’argent valant lui aussi 1 livre. Ces monnaies coexistent avec toutes sortes d’autres françaises comme étrangères.
la Révolution
Le système monétaire très stable mis au point après les crises du début du 18eme siècle (1 louis vaut 4 écus, 1 écu vaut 6 livres ou francs), explose avec l’insécurité révolutionnaire. Les Français gardent leurs pièces et le gouvernement doit émettre une monnaie de papier de remplacement gagée sur les biens nationalisés du clergé : l’assignat qui ne tarde pas à ne plus rien valoir du tout. En 1795, le Directoire abolit le système monétaire de Charlemagne, le franc vaudra désormais 100 centimes. Une pièce de 5 francs est frappée en argent.
le franc germinal
Bonaparte prend le pouvoir en 1799 et fait frapper en 1803 la première pièce d’un franc en argent, dite « franc germinal » car la loi qui l’a créé date du 17 germinal en XI selon le calendrier républicain. Résistant à toutes les révolutions et changements de régimes, le franc va servir de monnaie de référence internationale jusqu’à la première guerre mondiale, faisant même des petits au-delà de ses frontières (les francs suisses, belges, luxembourgeois alignés sur la valeur du franc français tout comme alors la lire italienne et la drachme grecque). Parallèlement, les français commencent à s’habituer aux billets imprimés par la Banque de France qui leur permet de retirer leur valeur en or à ses guichets. Mais dans les rues et les campagnes on compte toujours en sous (5 centimes), livres (1 franc), écus (6 ou 3 francs) et louis (24 puis 20 francs).
la descente aux enfers
La guerre et ses dépenses forcent l’Etat à mettre fin à la convertibilité en or des billets et à retirer les pièces en or. La monnaie se fait rare et on doit émettre des « monnaies de nécessité » (jetons, timbres….) La guerre finie, le franc est remplacé comme monnaie de référence internationale par la livre sterling puis le dollar et ne cesse de perdre de sa valeur. Frappé désormais en métaux communs (nickel, bronze, aluminium) il survivra difficilement à la seconde guerre mondiale.
le nouveau franc
Voulant redonner du prestige au franc, le général de Gaulle décrète le « nouveau franc » qui vaudra 100 « anciens francs » et fait frapper des pièces de 1 F en nickel et de 5 francs en argent. Après quelques années de calme, le franc reprend sa chute cette fois face au mark, nouvelle monnaie de référence européenne. L’arrimage au mark à partir des années 1980, la politique du franc fort, et l’intégration au système monétaire européen, vont précéder la fusion dans l’euro en 1999. Trois séries de billets se succèdent pendant la période : les 50 francs « Racine » dans les années 80, « Quentin de la Tour » dans les années 70, « Saint -Exupéry » dans les années 90.
Les onze autres monnaies qui ont disparu :
le mark allemand : introduit en 1871, remplacé par le reichmark en 1924 puis de nouveau le mark en 1948. Un euro vaut : 1,96 mark.
le mark finlandais : introduit en 1867 alors que la Finlande est encore un grand duché russe. Un euro vaut : 5,95 mark finlandais.
le franc belge : introduit en 1832 et lié au franc français avant de rejoindre la zone mark à partir des années 70. Un euro vaut : 40 francs belges.
le franc luxembourgeois. Introduit en 1848 et en union monétaire avec le franc belge depuis 1921. Un euro vaut : 40 francs luxembourgeois.
le schilling : il remplace la couronne autrichienne disparue par l’hyperinflation en 1923. Un euro vaut :13,8 schillings.
la drachme. Monnaie de l’Athènes antique, elle devient celle de la Grèce tout juste indépendante en 1833. Un euro vaut : 341 drachmes.
le florin : venu de Florence, il s’impose aux Pays-Bas à la Renaissance sous le nom de « goulden ». Un euro vaut : 2,20 florins.
la livre irlandaise : introduite en 1927, la « punt » était jusqu’en 1999 liée à la livre sterling voisine. Un euro vaut : 0,79 livre irlandaise.
la lire : la « livre » italienne a été introduite en 1862 succédant à la lire génoise puis piémontaise. Un euro vaut : 1938 lires.
l’escudo : devenu une République en 1911, le Portugal remplace son « real » (royal) par l’escudo. Un euro vaut : 200 escudos.
la peseta : le « petit poids » est devenu la monnaie officielle de l’Espagne en 1868. Un euro vaut : 166 pesetas.